On a eu le plaisir de nous entretenir avec Thierry, 50 ans, uni à Valérie depuis les bancs de la maternelle, ce qui fait de leur histoire leur plus belle aventure.
Thierry, d’où vous vient cette fibre du voyage ?
Aussi loin que je me souvienne j’ai tout le temps eu « la bougeotte ». Enfants, mes parents déménageaient régulièrement, haut comme trois pommes je partais sur les routes de France dans le semi-remorque de mon oncle et à 16 ans je prenais le train pour mon 1er long voyage ferroviaire, direction l’école des sous-officiers de l’armée de l’air… Je m’étais engagé dans l’aviation attiré par les voyages mais la vie militaire n’était pas pour moi. Alors, j’ai laissé tomber l’uniforme et j’ai continué de « bouger », à pied, un peu en vélo, beaucoup en auto-stop et un jour en train + bateau vers ma première destination étrangère : Copenhague.
Deux personnages se côtoient en moi depuis toujours, celui du sédentaire qui entreprend, qui échafaude des projets, qui veut réussir et celui du nomade, baluchon sur l’épaule, en quête d’aventures, de rencontres, de nouveautés. Le premier l’a souvent emporté sur le second. J’ai beaucoup voyagé en France, avec mon épouse, principalement en Auvergne, puis dans le Centre, les Landes, la Corse, la Bretagne, Paris et maintenant la Provence. Bien sûr j’ai franchi quelques frontières, je suis allé au Danemark, en Tunisie, en Turquie, en Grèce, en Italie, en Espagne, en Suisse, en Belgique, en Allemagne, en Suède, en Australie, au Maroc aussi. La destination qui marqua un tournant dans notre façon de voyager fut l’Asie : Bali, la Malaisie, le Cambodge et Singapour. Pour la première fois de notre vie, en 2010, nous embarquions à bord d’un long courrier, destination Bali avec la ferme intention de réaliser nos rêves d’expatriation et de tour du monde.
Quel voyage vous a le plus marqué ? Pourquoi ?
Incontestablement Bali et pour plusieurs raisons. Nous étions partis sur « L’île des Dieux » pour mettre en œuvre et administrer une maison d’hôtes végétarienne et éco touristique. A 45 ans ce projet était vraiment « Le » projet de notre vie, celui qui donnait un sens particulier à notre existence parce qu’il conciliait réalisation entrepreneuriale et fortes convictions personnelles dans le respect de nos valeurs. Après pratiquement 30 ans de carrières professionnelles (et oui nous avons commencé à travailler très tôt…) nous avions réuni un pactole qui nous donnait les moyens financiers d’investir sur un beau complexe en construction traditionnelle, au cœur de la campagne balinaise et en front de mer. Les 2 premières années nous avons fait des allers-retours trimestriels pour préparer notre arrivée, nous familiariser avec les lieux, faire connaissance avec les indonésiens et pour renforcer nos liens avec la compagnie franco-indonésienne avec laquelle nous avions monté le projet. Les 2 années suivantes, en 2013 et 2014, nous étions résidents sur la région de Kerobokan puis de Ubud. Finalement la maison d’hôtes « L’Oasis » n’a jamais été terminée, les compatriotes à qui nous avions fait confiance nous ont dépouillés. Ils sont aujourd’hui en prison après avoir dilapidé l’argent de plus de 200 investisseurs… Mais ce n’est pas de cela dont j’ai vraiment envie de vous parler.
Ce dont j’ai envie de vous parler c’est d’une autre histoire, l’une de ces belles histoires qui participent aux légendes magiques de ce coin d’Asie du Sud-Est. Lorsque j’ai mis les pieds la première fois sur cette île, je me suis rendu compte, après ma première semaine de séjour, que j’avais déjà rêvé tout ce que je découvrais jour après jour… Quelques mois plus tôt, dans un bureau parisien, au cours d’un exercice de coaching j’avais rêvé ma future vie sur une feuille de papier. A ce moment-là, je n’avais jamais entendu parler de Bali et si on m’en avait parlé j’aurais été bien incapable de la situer sur une carte. Sur une feuille de format A4 j’ai alors dessiné ce qui me venait à l’esprit : la mer, un stand pour le droit des animaux sur la plage, une guitare avec un livre et un pinceau symboles de culture, une longue route, un chien, des gens qui donnent et qui reçoivent, une vache attachée, un soleil resplendissant, le cercle du Yin et du Yang, un arc-en-ciel, la forêt, un van hippie, la nature et un magasin-restaurant. J’ai donc vécu mon premier contact avec Bali, comme un dessin prémonitoire qui se réalisait sous mes yeux. Fantasme ? Illusion ? Vue de l’esprit ? Réalité ? Projection ? Manipulation mentale ? Finalement cela m’importe peu. Je l’ai vécu et ce fut un immense moment de bonheur qui donna un sens encore plus profond et singulier à notre voyage. Je parle plus en détail de cet épisode dans un article consacré à l’Archétype.
Malgré la promotion immobilière et un développement effréné, Bali c’est encore une nature omniprésente, des paysages magnifiques, quelques territoires vierges du tourisme de masse, une faune par endroit protégée, une jungle toujours présente, de somptueux fonds marins et des volcans qui rappellent que du jour au lendemain « les dieux » pourraient bien se mettre à nouveau en colère… Quoi qu’il en soit et quel que soit devenu ce paradis perdu, Bali est de toute façon empreint d’un esprit envoûtant que certains qualifient un peu trop rapidement de spirituel en le confondant avec le religieux. Cet esprit, cet environnement, cette atmosphère vous étreignent sans que vous vous en aperceviez vraiment sauf au moment de monter à nouveau dans l’avion, avant de devoir repartir et de vous sentir comme orphelin. Bali c’est aussi, malgré des lois parfois contraignantes et une certaine violence coutumière qui ne saute pas aux yeux du premier venu, un grand terrain de liberté. La diversité des cultures, le brassage des origines, le croisement des âmes et des parcours de vie en quête de sérénité, de paix, de sagesse et de connaissance, font également de Bali une sorte de laboratoire où se mêlent là aussi le spirituel et le religieux. A l’image du « Poleng », ce tissu traditionnel à damier noir et blanc qui symbolise le mode réel et le monde surnaturel, l’ordre et le désordre, le bien et le mal, le pur et l’impur, Bali est une dualité exacerbée en tous points qui tend à s’harmoniser. A la fois enfer et paradis, c’est comme cela que j’ai ressenti Bali.
Quels conseils donneriez-vous à ceux qui veulent se lancer dans un tour du monde ?
Je crois qu’en la matière, comme pour pratiquement pas mal de sujets, la compréhension intellectuelle, les modes d’emploi, l’expérience des autres, la préparation, sont bien futiles si finalement il n’y a pas de passage à l’acte. Alors de mon point de vue, le meilleur conseil est sans doute de lâcher prise, de larguer les amarres, de se mettre en route et de réfléchir ensuite. En résumé, ce que nous n’avons pas encore réussi : do it!
Vous êtes dorénavant végétalien, d’où vous vient ce changement de mode d’alimentation ?
L’homme est végétalien par nature. De part sa constitution, sa vue, son odorat, sa dentition, sa mastication, sa salive, ses organes digestifs et biens d’autres parties de son corps, l’homme n’est ni carnivore, ni omnivore. Pourtant, dans les faits, la grande majorité des êtres humains se nourrissent de régimes carnés. Etre végétalien, s’est tout simplement s’alimenter de façon saine et tout à fait normale. Le vrai changement d’alimentation, choisi ou influencé, subit ou pleinement assumé c’est donc de devenir omnivore… Pour moi et Valérie, l’alimentation végétalienne fut avant tout la prise de conscience de la souffrance animale. Il y a 12 ans, quand nous mangions les animaux, nous n’étions ni racistes, ni sexistes, pourquoi aurions-nous dû continuer à être spécistes, à faire une différence entre les animaux que l’on protège, que l’on aime et ceux que l’on torture et que l’on tue ? La nature est régulièrement violente. Notre monde, lui, celui que l’espèce humaine a façonné, est sanguinaire. 1000 milliards de poissons, 60 milliards d’animaux « de boucherie » sont tués chaque année pour notre consommation, sans parler des centaines de millions d’autres êtres sensibles assassinés dans les laboratoires, pour l’industrie de la mode, pour la « culture » ou encore par tradition. Comment peut-on espérer orienter le cours de nos vies vers plus d’amour, plus d’harmonie et de paix en ingérant 3 fois par jour toute cette souffrance ? Nous violons, nous kidnappons, déportons, séquestrons, nous enfermons dans des camps de concentration, torturons ces milliards d’individus parce qu’ils sont différents et à notre merci : c’est le plus grand holocauste que nous n’ayons jamais commis. Si l’on ajoute à cela des raisons évidentes de santé, d’écologie, de survie de la planète, de répartition des richesses, largement traitées par les médias, les scientifiques, les associations et les spécialistes que faudrait t-il encore d’autre pour continuer à nier l’évidence en ne devenant pas vegan ?
Avez-vous une destination qui vous fait rêver encore manquante à votre palmarès ?
Pour l’heure nous avons posé nos valises à Orange, dans le sud de la France. La Provence et la région PACA sont des territoires magnifiques que nous avons commencé d’explorer et à partir desquels nous pouvons investiguer l’Italie et l’Espagne. Plus tard nous aimerions découvrir le continent américain, certains endroits au Canada, aux Etats-Unis mais aussi en Amérique Centrale et en Amérique du sud : le Costa Rica et l’Uruguay. Plus proche de nous, nous pensons à l’Angleterre que nous ne connaissons pas. A 50 ans, il est un peu tard pour nous d’envisager tous ces projets, pensez-vous ? Ce qui fait la différence entre expatriés et voyageurs aux longs cours c’est peut-être que les premiers perçoivent la destination comme une finalité alors que les seconds n’y voient qu’une étape sur le chemin de la connaissance. Appréhender le voyage extérieur comme étant sans fin et non sans retour c’est aussi partir en voyage intérieur, à la découverte de soi. Pour ce genre de trip, le plus tôt est le mieux mais non je ne pense pas qu’il soit jamais trop tard pour se mettre en route !
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